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Le cadre législatif des regroupements de crédits

Rachat de crédits : une diminution de la mensualité

L'unique argument du rachat de crédits est la diminution de la mensualité, et, par conséquence du taux d'endettement. Avant la loi Lagarde, on trouvait régulièrement des slogans comme 'Réduisez vos remboursements de 50%' ou 'Diminuez vos mensualités jusqu'à 60%'. Depuis, en application de l'article L311-5 du code de la consommation, il est interdit, dans toute publicité de « laisser entendre que le prêt améliore la situation financière ou le budget de l'emprunteur, entraîne une augmentation de ressources, constitue un substitut d'épargne » sans contrepartie financière.
C'est facile de baisser le montant d'échéance d'un crédit, il suffit d'en augmenter la durée mais cela ... augmentera le coût total du crédit. Prenons l'exemple d'une publicité pour une agence de courtage en rachat de crédit :
Situation avant le rachat
Revenus mensuels3.000 €
Charges mensuelles (dont loyer)600 €
Total des mensualités1.030 €
Taux d'endettement + loyer54 %
Détails des crédits en cours
CréditMontant restant à payerMensualité
Prêt personnel22.300 €680 €
Crédit renouvelable / revolving6.000 €350 €
Dettes diverses amis / famille2.500 €

Situation après le rachat
Revenus mensuels3.000 €
Charges mensuelles (dont loyer)600 €
Mensualité unique340 €
Taux d'endettement + loyer31 %
Détails du crédit proposé
CréditMontant restant à payerMensualité
Rachat du prêt avec 1.500 € de
trésorerie mise à disposition
33.500 €340 €
A première vue, cette opération est séduisante. On passe d'une mensualité de 1.030 euros à 340 euros, soit une économie de 690 euros par mois, en soldant les dettes actuelles de 2.500 euros et en obtenant 1.500 euros de liquidité. Le taux d'endettement (avec loyer) passe, lui, de 54% à 31%.

Une opération coûteuse pour l'emprunteur

L'opération de rachat est quasi systématiquement plus coûteuse au final. Si on reprend l'exemple précédent, des éléments essentiels n'ont pas été précisés. Ce sont, d'une part, les durées restantes du remboursement, d'autre part, la durée et le taux du crédit proposé.
En prenant une hypothèse de taux d'intérêt d'environ 19% pour le crédit révolving et de 6% pour le prêt personnel, on obtient le tableau suivant :
Détails des crédits en cours / Crédit proposé
CréditMontant
restant à
payer
MensualitéTaux
(assurance
comprise)
Durée restanteCoût
du crédit
Prêt personnel22.300 €680 €6,33 %3 ans2.180 €
Crédit revolving6.000 €350 €19,77 %20 mois1.000 €
Crédit proposé33.500 €340 €6,96 %12 ans15.460 €
Le coût du crédit passe de 3.180 euros à plus de 15.000 euros. La durée restante de remboursement qui était de 3 ans (avec un allègement de la mensualité après 20 mois) passe à 12 ans.
La solution proposée dans notre exemple comporte aussi des frais cachés. Ce sont des frais de courtage pour l'agence et des frais de dossier pour l'organisme financier. Le montant du crédit proposé est de 33.500 euros. Il aurait dû être de 22.300 + 6.000 + 2.500 + 1.500, soit 32.300 euros. Les 1.200 euros supplémentaires correspondent à ces frais.

Une opération utile

Néanmoins, cette opération de restructuration peut s'avérer utile voire indispensable dans certaines situations. Ce rééchelonnement des dettes dans le temps permettra de diminuer les remboursements mensuels et d'augmenter son pouvoir d'achat à court terme.

Une opération rentable

Toutes ces opérations de rachat de crédits sont très rentables pour les organismes de financement qui les proposent ainsi que pour les courtiers. Il faut savoir qu'un courtier percevra une commission bien supérieure sur une opération de rachat de crédit que sur un crédit immobilier classique, pour un montant d'emprunt identique. Les organismes prêteurs qui financent les rachats de crédit sont assez peu nombreux en France : il s'agit de GE Money Bank, Banque Royal St Georges, Barclays, CFCAL et de quelques autres. Les banques semblent s'intéresser de plus en plus à ce créneau.

Le cadre législatif et réglementaire des regroupements de crédits

Le regroupement de crédits correspond à une « opération de crédit [qui] a pour objet le remboursement d'au moins deux créances antérieures dont un crédit en cours » (article R313-12 du code de la consommation). En conséquence, le rachat d’un seul crédit (immobilier ou à la consommation) est exclu de ce dispositif.

Le regroupement de crédits à la consommation

Cette opération est soumise aux dispositions du code de la consommation, même si son montant total (prêts à regrouper + un éventuel apport de trésorerie) dépasse les 75.000 €, plafond habituel des crédits à la consommation.
Si ce regroupement comprend un crédit renouvelable, l'établissement qui met en place l’opération doit impérativement rembourser directement le prêteur initial. Lorsque le regroupement de crédit porte sur la totalité du montant restant dû d’un crédit renouvelable, le prêteur doit rappeler à l'emprunteur la possibilité de résilier le contrat afférent et doit lui proposer d'adresser sans frais la lettre de résiliation signée par l'emprunteur.

Le regroupement de prêts immobiliers

Cette opération est soumise aux dispositions du code de la consommation régissant les prêts immobiliers, même si son montant total (total des prêts à regrouper + éventuellement un prêt immobilier supplémentaire) est inférieur à 75.000 €.
Le montant total des prêts immobiliers objets du regroupement inclut tous les coûts, les intérêts, les commissions, les taxes, les indemnités de remboursement anticipé et autres frais que l'emprunteur est tenu de payer pour le remboursement de ces crédits. Les frais de mainlevée d’hypothèque ou de privilège de prêteur de deniers sont également à intégrer dans la liste de ces coûts, si l’établissement qui propose le regroupement de crédits souhaite inscrire une garantie sur le bien immobilier en premier rang.

Le regroupement de prêts à la consommation et de prêts immobiliers

Avant la réforme du crédit à la consommation du 1er juillet 2010, ces opérations n’étaient pas réglementées et étaient considérées, au gré du prêteur, comme des crédits immobiliers ou des crédits à la consommation. La jurisprudence dans le domaine avait d’ailleurs fait l’objet de plusieurs revirements. Le taux appliqué au nouveau crédit était le plus souvent celui des prêts à la consommation.
La nouvelle réglementation a précisé des règles en la matière :
  • Lorsqu'un regroupement de crédit comprend un ou des crédits immobiliers dont la part relative ne dépasse pas 60%, le nouveau contrat de crédit relève des dispositions sur les crédits à la consommation.
  • Lorsque la part des crédits immobiliers est supérieure ou égale à 60%, c’est la législation sur les prêts immobiliers qui s’applique.
  • Dans le cas où les crédits (immobiliers et à la consommation) à regrouper sont nombreux, la loi n’interdit pas de mettre en place 2 regroupements différents (un de chaque type).

Points communs à tous les regroupements de crédits

  • Publicité. La publicité sur le regroupement de crédits est soumise aux mêmes contraintes que la publicité sur le crédit à la consommation ou le crédit immobilier selon le cas.
  • Nouveau financement. La loi n’interdit pas que le montant du regroupement de crédits soit supérieur au total des crédits rachetés, du fait de l’intégration d’un nouveau financement.
  • Assurance-décès. Il est bien rare que les contrats d’assurance souscrits pour couvrir les prêts rachetés puissent être poursuivis. Le regroupement de crédits fait donc souvent l’objet d’un nouveau contrat d’assurance pour le montant global de l’opération. Le coût de cette assurance (si elle est obligatoire) doit être intégré dans le calcul du taux effectif global du prêt.
  • Contrat de prêt. Le contenu du contrat de prêt relatif à un regroupement de crédit est celui prévu pour chaque type de regroupement (crédit à la consommation ou crédit immobilier).
  • Garanties. Le prêteur est en droit de demander que le regroupement de crédit soit assorti de garanties (cautionnement d’un proche, inscription d’hypothèque sur un bien appartenant à l’emprunteur, etc). Le coût de ces garanties doit être intégré dans le calcul du taux effectif global du prêt.
  • Taux du prêt. Le taux du nouveau prêt est soumis à la législation sur l’usure en fonction du type de regroupement (crédit à la consommation ou crédit immobilier).
  • Taux effectif global. Le regroupement de crédits est soumis aux règles relatives au TEG, qu’il soit composé de prêts à la consommation, de prêts immobiliers ou des deux types de financement.
  • Remboursement anticipé. Les règles de remboursement anticipé du prêt né du regroupement de crédits dépendent du type de regroupement (crédit à la consommation ou crédit immobilier).
  • Date d'application. Ces dispositions sont applicables en France métropolitaine depuis le 1er septembre 2010 et en Outre-mer à compter du 1er mai 2011.

Dispositions applicables aux offres de prêt émises à compter du 1er janvier 2013

Le prêteur devra, avant l’émission de l’offre de prêt, établir un document d’information qui recense les éléments des prêts en cours et dettes à regrouper et qui présente les caractéristiques du prêt de regroupement. Le modèle de ce document (tableau annexé au décret n°2012-609 du 30 avril 2012 et à l’article R313-13 du code de la consommation) doit permettre à l’emprunteur d’évaluer le bilan de l’opération de regroupement.
Ce tableau est complété :
  • pour la partie gauche (prêts en cours et dettes à regrouper) à partir des éléments et documents fournis par l’emprunteur,
  • pour la partie droite (prêt de regroupement) par le prêteur chargé d’émettre une offre de regroupement de crédits.
Dans le cas où tous les documents nécessaires à l’élaboration de ce tableau n’ont pu être produits par l’emprunteur, le prêteur « indique sur le document les mentions qui n'ont pu être complétées et avertit l'emprunteur des difficultés financières et pratiques qu'il pourrait rencontrer s'il souhaitait néanmoins poursuivre l'opération sans en connaître tous les paramètres » (article R313-14 du code de la consommation).
L’emprunteur doit également être informé des incidences de cette opération sur les droits dont il était titulaire au titre des prêts qui vont faire l’objet du regroupement et notamment :
  • De la perte du bénéfice des cautionnements qui garantissaient certains prêts (cautionnements de Crédit Logement et d’autres sociétés de caution mutuelle, par exemple) ;
  • De la perte de la couverture assurance souscrite au titre des prêts regroupés ;
  • Des modifications pouvant intervenir sur la couverture assurance du fait de la souscription d’un nouveau contrat destiné à garantir l’opération de regroupement (nouveaux délais de carence et nouvelles franchises) ;
  • De l’obligation d’informer les éventuels coemprunteurs des crédits concernés par le regroupement ;
  • De la perte du droit à agir à l’encontre du vendeur du bien financé pour demander la résolution judiciaire du contrat de vente (dans le cas où un prêt affecté est inclus dans le regroupement).
Le document remis à l’emprunteur prévoit également les modalités pratiques de l’opération : liste des démarches à effectuer par chacune des parties (emprunteur / banque), dates auxquelles va cesser le remboursement des prêts regroupés, dates de règlement des échéances relative au regroupement de crédit…
Le document doit être remis à l’emprunteur :
  • en même temps que la fiche d’information obligatoire (si le regroupement est de type crédit à la consommation),
  • au moment de l’émission de l’offre de prêt (si le regroupement est de type prêt immobilier).

Optimiser un rachat de crédit

Comme tous les prêteurs, l'organisme financier étudiera votre dossier et vous proposera un financement en fonction de votre profil et du risque potentiel qu'il représente.
Le critère principal est le taux d'endettement à l'issue de l'opération qui sera souvent accepté jusqu'à 40 ou 45% sous réserve que le reste à vivre soit suffisant. Le reste à vivre est la somme d'argent disponible après déduction des charges obligatoires, en fonction de la composition familiale et la zone géographique.
D'autres critères sont examinées : le taux d'endettement avant opération, le nombre de crédits souscrits, le nombre d'incidents de paiement voire d'interdiction, votre âge, votre situation familiale et professionnelle...
Il faut préciser qu'entre les prêteurs, les taux d'endettement avant ou après, ou, le reste à vivre ne sont pas calculés tout à fait de la même manière. Quelquefois encore, dans le même organisme, le taux d'endettement avant et le taux d'endettement après ne se calculent pas de la même façon ! Les différences se font sur les allocations familiales, les revenus du chômage, les revenus fonciers... que ne seront retenus qu'en partie ou pas du tout.

Notre conseil

Pour optimiser votre rachat de crédits et obtenir les meilleurs taux de financement, il faut absolument présenter le meilleur profil d'emprunteur. Facile à dire, n'est-ce pas ? Cela veut simplement dire qu'il est préférable d'anticiper et de négocier avant d'avoir des incidents de paiement qu'après. Avant une baisse prévue des revenus qu'après. Si vous prévoyez un rachat de crédits, n'attendez pas d'y être contraint !
Soyez vigilant sur les frais de l'opération qui seront toujours intégrés dans le nouveau montant emprunté. Quelquefois, le prêteur ajoute le montant d'une ou plusieurs mensualités dans le montant emprunté, le temps de traiter les remboursements complets des crédits repris.
Par ailleurs, certaines offres des prêteurs ne seront possibles que s'il y a mise à disposition d'une trésorerie supplémentaire.

Les taux de crédits

Les taux de crédit proposé lors d'un rachat peuvent varier de 1 point à plus de 3 points en plus d'un taux de référence, selon votre profil d'emprunteur. Par exemple, pour un crédit révisable indexé sur un Euribor 3 mois à 5%, le taux client pourra être de 6% à plus de 8%. Bien entendu, il est toujours plus prudent de choisir une offre à taux fixe mais la fixation des taux suivra la même méthode.
Le taux dépendra aussi de la durée de remboursement. Celui-ci est fixé par tranche de durée. Par exemple, entre 1 et 10 ans : 6% ; entre 11 et 15 ans : 6,20%... Il est alors plus intéressant de prendre une durée de 10 ans que de 11 ans.

Les alternatives au rachat de crédits

Sans préjuger d'accidents de la vie qui auraient provoqué une situation d'endettement importante, faire diminuer trop fortement ses mensualités quand il n'y a pas eu de baisse de revenu est certainement une solution dangereuse.
C'est dangereux, car cela donne l'impression d'un désendettement dans le budget mensuel alors que toute la charge des remboursements est reportée dans le futur. Dangereux encore, car ces liquidités supplémentaires peuvent laisser croire que l'on peut de nouveau souscrire de nouveaux emprunts.
Les alternatives aux rachats de crédits, c'est d'abord une gestion plus prudente et moins dépensière de son argent. C'est aussi votre banque habituelle car il est plus malin d'avoir un seul prêt bancaire à la consommation que plusieurs crédits avec des cartes de magasin. C'est aussi de faire des remboursements anticipés pour rembourser les crédits en cours en cas de rentrée d'argent.
Pour reprendre notre exemple du début. Il y a peut-être d'autres solutions à négocier avec la banque sur le prêt personnel :
  • la durée restante des 3 ans peut-elle être portée à 4 ou 5 ans, ce qui réduirait la mensualité de 680 euros à 526 euros ou 433 euros. Une réduction de 250 euros mensuels qui permettrait d'attendre 20 mois le remboursement du crédit revolving (renouvelable) et de souffler un peu.
  • l'encours du crédit peut-il être augmenté pour rembourser le crédit revolving ? Ce qui reviendrait à faire un seul crédit comme pour le rachat de crédit.